Uderzo à Saint-Brieuc

Sachant qu’Albert Uderzo, décédé le 24 mars 2020, avait vécu quelque temps à St-Brieuc pendant la guerre, je me suis permis de l’utiliser dans mon roman Le Semblant (en librairie depuis le 25 juin 2019). J’ai imaginé qu’il y avait rencontré Louis Guilloux et Albert Camus.

(…)
– Uderzo : Alors ça c’est extraordinaire ! Je me retrouve à un repas en compagnie de Louis Guilloux et Albert Camus ! On ne me croira pas à Paris !
– Guilloux : Remettez-vous mon cher ! Ce sera peut-être nous un jour qui serons honorés de vous avoir connu. Albert, sais-tu que ce jeune homme a un grand talent de dessinateur ? Je lui prédis un bel avenir. Quel âge avez-vous ?
– Uderzo : Bientôt 20 ans.
– Camus : Vous n’êtes pas briochin ?
– Uderzo : Non, mais pendant la guerre j’ai été réfugié quelque temps au Cap d’Erquy avec mes parents. Ces jours-ci je suis revenu voir ce lieu, vraiment magnifique, même si attaché pour moi à des souvenirs douloureux. C’est là que j’ai rencontré Louis qui s’y promenait en famille. Il a eu l’amabilité de m’inviter chez lui ce soir, me disant qu’il y aurait un invité surprise. Et quelle surprise ! Je suis impatient de lire votre prochain livre. Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
– Camus : Un roman qui s’appellera La Peste.
– Uderzo : Sympa comme titre !
– Camus : Ça sent bon l’optimisme et la joie de vivre, hein ? Notre ami Louis m’aide beaucoup dans ce travail. Je lui ai fait lire le texte en cours, et il m’a écrit une lettre pleine d’avis fort intéressants dont j’ai tenu compte pour la plupart.
– Guilloux : En contrepartie, Albert m’aide beaucoup dans la rédaction de mon prochain livre, qui s’appellera peut-être Le Jeu de Patience.
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– Camus : Moi, je suis vraiment nul en dessin. Mais j’aime beaucoup cet art, car c’en est vraiment un. Il peut y avoir une telle expressivité dans une caricature. Je place ça entre la littérature et le cinéma. Je pense que la bande dessinée est un art qui va beaucoup se développer. Ça pourrait être une idée pour vous.
– Uderzo : J’ai déjà un peu commencé. Je suis fasciné par les histoires dessinées depuis ma plus tendre enfance. C’est comme si j’étais tombé dedans tout petit.
– Camus : Jolie expression ! Je vous conseille de la noter.
– Uderzo : Le succès est encore loin. J’ai créé récemment un personnage qui s’appelle Clopinard, mais il ne me plaît pas trop. Et puis je n’ai pas beaucoup d’inspiration d’histoires à raconter. En plus je suis daltonien, je ne peux même pas coloriser moi-même.
– Camus : Vous devriez travailler avec un raconteur d’histoires, et vous en feriez l’illustration. Ça m’aurait plu d’être scénariste de ce genre d’histoire, mais je ne suis pas vraiment parti pour ça.
– Uderzo : C’est encore possible. Quand vous voulez, je suis preneur.

(…)

1959, Paris
Albert Uderzo, dessinateur, et son collègue René Goscinny, raconteur d’histoires, cherchent une idée de BD.
– Tu sais qu’Albert Camus, qui a eu le prix Nobel en 57, avait eu envie d’être scénariste de BD ? Je l’ai rencontré une fois chez Louis Guilloux à Saint-Brieuc, quand j’étais jeune, et il m’avait dit ça. Tiens, je me rappelle que j’avais fait quelques dessins ce soir-là, un Gaulois un peu balourd, qui s’appelait, comment déjà… Jobalix ? ».
De leur bureau, ils aperçoivent l’obélisque de la place de la Concorde.
– Obélix, pendant que tu y es ! Et on pourrait lui rajouter un petit maigrichon…
– Et on situerait ça plutôt à l’époque de Jules César, ça sera plus parlant pour les lecteurs. Géographiquement, je serais assez inspiré par un magnifique cap que je connais, qui donne sur la Manche, le cap d’Erquy.
(…)

Une réflexion sur « Uderzo à Saint-Brieuc »

  1. Merci Patrice,, Armelle, la rescapée du Grand Léjon à Bréhat (te souviens tu ? ) continues dans la culture ! tu es un as de l’information !

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